De ce mois de novembre incroyablement doux, je retiens…
Les longues heures passées sur ce piano où je réapprends chaque chose pas à pas, un peu comme une convalescente qui retrouverait progressivement l’usage de ses doigts. Dans la difficulté et l’impatience. À présent, je me demande comment j’ai pu concevoir un jour de laisser le piano de côté : c’est un drôle de mystère, ce plaisir que l’on prend à engrener les notes, même lorsqu’on ne le fait pas très bien. Les oreilles sont malmenées, les doigts jubilent et c’est la jubilation qui l’emporte à chaque fois.
Les appels de M. qui surviennent toujours au bon moment précisément. M., ma cousine jumelle. Elle pourrait sentir une rage de dents que j’aurais ici à Paris depuis son appartement québécois. Toujours très loin et quand même toujours là. On a parfois besoin de se draper d’amour : en parlant d’elle ici, c’est ce que je fais, je crois.
Blonde, le nouvel album de Coeur de Pirate. Cette fille semble avoir avalé tout ce que la musique française a pu produire en cinquante ans et le transforme en quelque chose d’à la fois personnel et familier. Comme si on connaissait déjà la chanson, sans pouvoir se rappeler d’où. Avec des accents d’April March, aussi, et cette voix, un rien agaçante quelquefois, qui n’appartient qu’à elle. Une sensation de liberté, enfin : Cœur de Pirate joue la musique qu’elle aime exactement. C’est l’impression que donne son album en tout cas ; et comme au fond, je me tiens toujours du côté des gens libres…
Ces heures douloureuses, passées sous la coque du bateau, à dénuder les quilles jusqu’à la fonte. Je me sens bien dans l’inconfort des gros travaux. Je ne sais pas, c’est peut être cette espèce de silence partagé avec les autres bricoleurs, sur les bateaux autour de moi. Les conseils échangés dans le froid. Les mots couverts par le bruit des machines. Et puis j’aime contempler l’avancée du travail. Les bleus au creux des mains, les crampes me font presque plaisir si je me suis correctement acquittée de ma tâche. Enfin, c’est le bateau de mon grand-père : prendre soin du Youk Bé, c’est un peu prendre soin de lui. Les deux en ont besoin.
Les nuits passées en compagnie de Gabrielle, d’Adélaïde et de Florent. Les personnage de cette saga de Marie Laberge, Le goût du bonheur, que je n’ai pas encore tout à fait terminée. C’est V. qui m’a conseillé ça. Et cela se confirme, elle a vraiment le nez fin dès qu’il s’agit de s’adresser à mes cordes sensibles. Je retrouve dans ces héros bourgeois un peu de tout ce qui me touche dans l’humanité. Le tout dans cette langue québécoise qu’en France on connaît bien moins bien que l’on croit ; et cette période de l’histoire qui me fascine : entre les années trente et le milieu des années cinquante, où le monde occidental n’est qu’une boule de changements, d’évolutions et de révolutions.
Le chocolat noir à la fleur de sel de Lindt. Le poisson au sirop d’érable de B. qui est l’une des choses les plus succulentes au monde. Il faudra que je lui demande si elle veut bien que je publie la recette sur ce blog. Une jolie vidéo de FKY sur Venise, qui me donne envie de prendre immédiatement un billet pour cette ville que j’aime tant.
Cette petite bague surmontée d’une rose que j’ai bien envie de passer à mon doigt. Une tête de zèbre en papier peint. Ce bracelet qui me donne envie d’en porter, moi qui ne m’encombre jamais de bijoux fantaisie. Et toujours ces images inspirantes glanées ici et là, dont voici un petit florilège. Je me relis. C’est curieux, on dirait une lettre pour mon père.
Crédit photo : 1. Arbre de Noël – 2. Assiettes peintes – 3. Bague Rose – 4. Bois + Broderies – 5. Bracelet de bois peint – 6. Chien chaussette – 7. zèbre de papier rose – 8. Tapis à boules de laine – 9. Champignons